Le voyage à Erquy m’a en quelque sorte réconcilié avec une part de moi, mais la plaie est là, béante. Ma personnalité de Casanova instable, velléitaire et compulsif ne me satisfait plus. C’est ce que j’ai raconté à Aude tandis que je ne pouvais m’empêcher de fantasmer une fois de plus sur ses lèvres ourlées de rouge et sur ses escarpins noirs. Je suis une contradiction ambulante, des plaques tectoniques mal ajustées qui me tiraillent, m’enlèvent toute consistance et me font souffrir. J’aspire à plus d’unité et pourtant je n’arrive pas à m’y résoudre.
Je lui ai confié ma difficulté à m’interdire de m’envoyer en l’air avec les femmes. C’est alors qu’elle m’a dit une chose intéressante
Je ferme les yeux, j’entends les réacteurs de l’avion vrombir, la gravité me colle au siège, ma voisine se serre un peu contre moi, sans doute pour se rassurer un peu: réflexe atavique.Je me remémore ce qui s’est passé la veille entre Annie et moi. Peut-être étais-je de particulièrement bonne humeur ce jour-là, c’était la veille du début de mes congés.Entre nous, ce n’est jamais l’indifférence, sous le calme flirte la tension électrique et en pleine détestation affleure toujours la passion. Comme chien et chat. J’aime son esprit, ses formes, son caractère psychorigide et je crois que malgré elle, elle est fascinée par mon esprit souple, flirteur, aux antipodes de sa pensée et de la morale qui lui a &e
*** Point de vue de Paul ***Je prends ma douche et me lave soigneusement. Je suis à peine sorti du jet dru et chaud de l’eau, encore en train de m’essuyer avec la longue serviette blanche de l’hôtel que j’entends frapper à ma porte. La masseuse est ponctuelle, ça m’évitera d’avoir à me déshabiller!Je me précipite, les pieds encore mouillés pour ouvrir la porte. Et là, je reste un moment sans voix. Devant moi se tient la Latine dans toute sa splendeur, la brune qui me pourfendra le cœur. Une femme d’un peu moins de la trentaine, dans les 1,70m, toute en courbes, des yeux noirs où brille la flamme de l’esprit. Mon Dieu, ne parle pas ou si tu parles, parle bien, ne brise pas
*** Point de vue de Paul ***«Vous valez mieux que ça.»Ses mots résonnent dans ma tête comme le tocsin. Je tiens dans ma main sa chaîne au crucifix. Une croix toute simple en argent sans le Christ souffrant.Mon cœur rêvasse, a envie de s’enflammer: peut-être cette jeune femme sera ma rédemption, mon chemin, ma lumière?Ou est-ce encore une fantasmagorie de mon esprit? Pour le savoir, il n’y a qu’un moyen: la retrouver, lui parler. Et je verrai si ce fantôme de mon esprit prend chair ou, au contraire, une fois de plus, s’évanouit comme la fumée.Pour l’ins
*** Point de vue de Paul ***Je me réveille avec la gueule de bois. Je crois que j’ai abusé des bonnes choses hier et notamment du p’tit punch. Le souvenir de mes étreintes avec les deux nymphes vient me réconforter de ses ailes languides. Jusqu’ici je ne me voyais guère père, me voilà possible géniteur me dis-je sans me faire d’illusions sur les intentions de mes deux nouvelles copines. Géniteur, mais pas père… Après tout, pourquoi pas? Et surtout, si ce n’est pas moi, ce sera un autre, et j’en ai bien profité. Personnellement je préfère qu’un enfant atterrisse dans les bras d’un couple de lesbiennes qui le désire fort plus que dans ceux d’un couple d’hétéro
Nous sommes tous facilement explicables, mais restons inextricables (Vénus à la fourrure, Sacher Masoch)*** Point de vue de Paul ***La bruyère courbe l’échine sous le vent de Bretagne. En bas des falaises, le ressac fait entendre son grondement. Les odeurs des genêts et de l’iode se mélangent.J’avance sur une longue plage de sable fin, longue à n’en plus finir. Le sable me brûle la plante des pieds. Les minuscules particules crissent doucement.Le ciel est d’un bleu vraiment bleu, comme on en voit dans les prospectus d’agence de voyages. La mer est d’un vert opale, genre pub shampoing L&r
Je me trouve au seuil. Puis je prends du recul. Pour la première fois, je détaille la porte du 7 rue de l’enfer. C’est une porte impressionnante, fantastique. Le pourtour vertical est constitué de deux monstres marins à la queue d’hippocampe, la tête à l’envers, et le tympan, d’une gueule de lion avec sa crinière de part et d’autre en forme de vagues, ouverte, prête à dévorer le visiteur impudent. La porte, quant à elle, en bois épais et vermoulu est percée d’une petite lucarne recouverte d’une grille en fer forgé.Il y a plus accueillant quand on y songe. J’appuie sur le bouton de l’interphone. La voix chaleureuse d’Aude en contraste avec mes impressions précédentes me répond. Je franchis le passage. Tout me semble nouveau alors que cela fa
*** Point de vue de Linda ***En ce froid jour de décembre, je m’apprête pour mon travail. Je n’ai pas mis longtemps à décrocher un travail dans une agence de voyages en tant que conseillère-clientèle.Le responsable m’avait dit en me reluquant: «Avec votre présentation et votre maîtrise du français, vous avez le profil parfait pour faire voyager la clientèle rien qu’en vous regardant.»J’avais répondu à son compliment déguisé un peu lourd par un grand sourire. Lui-même ou devrais-je dire François n’était pas désagréable à regarder avec son costume et sa chemise blanche.
*** Point de vue de Paul ***L’instant d’après que mes aveux soient sortis de ma bouche, le stylo d’Aude s’arrête d’écrire dans sa course sans fin. J’imagine la ligne de calligramme presque illisible sur le papier blanc pareille à un électroencéphalogramme qui s’arrête, suspendue au cheminement de sa conscience entrelacée à la mienne. L’espace d’une heure, nos deux consciences vivent en osmose, c’est sans doute pour ça que les séances de psychothérapie sont aussi intenses et éprouvantes. Nous sommes nus, vulnérables.—Vous vous rendez compte que vous avez frappé votre femme?Je ne m’agite m&ecir